Aosvy, la cicadelfe, regardant avec curiosité Aldébaran accroché sur la poitrine d'Anton: c'est quoi, cet animal sur ta veste?
Anton: c'est mon téléphone mobile, il me sert principalement à téléphoner. Comme dit Galen, c'est la moindre des choses pour un mobile qu'il permette de téléphoner. Mais il est beaucoup plus pour moi, il est comme un ami. Avec lui, je n'oublie plus mes rendez-vous puisqu'il me les rappelle gentiment en me les susurrant dans le creux de l'oreille. Il est pour moi comme un complément de mémoire. Il enregistre toutes les situations, mes réunions, ce que je dis, ce que les autres disent... Il me rappelle le nom des personnes que je rencontre, même si je ne les ai rencontrées qu'une fois. Il m'indique si cela fait très longtemps que je ne les ai vues et de quoi nous avions discuté lors de notre dernière entrevue. C'est aussi un traducteur instantané et ceci quelque soit la langue: un peu comme c3po de la guerre des étoiles mais en plus petit et plus dynamique.
Il est capable de me faire une synthèse de ce que nous avons vu pendant la journée. Il me met en communication téléphonique avec n'importe qui de façon automatique dès que je le lui demande. Il est autonome: il est capable de se recharger seul, de se déplacer sur ses roulettes ou de voler comme une mouche. Il tourne la tête et possède une vision binoculaire. Grâce à cette vision, il peut savoir si les objets sont éloignés ou proches comme nous le faisons.
Aosvy tendant les bras comme un enfant le ferait devant un adulte pour avoir l'objet tant désiré: est-ce que tu peux me le donner?
Anton détachant le mobile intelligent de sa poitrine: Je ne peux te le donner, mais je peux te le prêter un moment pour que tu l'observes. Il se nomme Aldébaran, c'est une des dernières générations de mobile que l'on nomme smartmob ou mobile mobile...
Aldebaran donnait l'impression de ne pas vouloir quitter Anton en faisant une moue et en rallongeant ses bras télescopiques vers Anton.
Aosvy attrapant délicatement l'objet avec ses mains aux doigts fins: Qu'il est mignon! C'est comme une... poupée. Je crois que c'est comme cela que vous appelez vos représentations humaines de petites tailles pour vos enfants.
Anton, toujours aussi étonné par les progrès rapides des Cicadelfs: C'est bien cela. Nous avons voulu que les téléphones ressemblent de plus en plus aux êtres vivants. Nous avons voulu qu'ils disposent de deux yeux, les caméras, et d'une tête qui tourne. C'était les premiers éléments de ressemblance. L'important était de développer le sentiment d'attachement sur un large public. Il fallait que le mobile mobile devienne l'objet "transitionnel"...
Johan, à proximité, écoutant la conversation d'une oreille distraite: Pour en vendre un max et faire monter l'action...
Anton, coupé dans ces réflexions: Non, il n'y a pas que le fric dans la vie... Il y a aussi pour le créateur de cet objet un besoin d'aider toutes les personnes dans l'isolement ou dans l'incapacité de communiquer à cause d'un quelconque handicap physique...
Johan, avec un sourire: Oui, je suis d'accord d'aider la veuve et l'orphelin mais si on peut se faire du fric, c'est pas plus mal...
Anton fit une moue et se retourna en s'accroupissant devant Aosvy: Ce petit objet qui a et qui va aidé de nombreuses grand-mères dans leur solitude est un bijou technologique. Sur son corps, il y a un écran permettant de voir les personnes en visiotéléphonie, ou le dernier film et les vidéos des enfants éloignés par projection sur un mur. Les premiers mobiles avaient un clavier. Celui-ci n'en a pas besoin puisqu'il est possible de lui demander directement d'appeler la personne désirée.
Aosvy serrant de plus en plus Aldebaran qui avait profité de la proximité d'Anton pour se raccrocher à lui: Pourquoi veut-il partir? Il n'aime pas que je le touche?
Anton, souriant et reprenant le mobile mobile qui fit une mimique bien humaine de soulagement: Il déteste qu'une autre personne que moi le touche. Il a été programmé pour qu'il me reconnaisse et ne réponde qu'à mes demandes.
Anton se souvenant: Au début, il était important de toucher les téléphones mobiles pour pouvoir communiquer avec eux, pour taper un numéro sur un clavier qui est devenu écran tactile plus tard. Actuellement, plus besoin de contact, le mobile animal se déplace en s'accrochant sur nos habits comme un ouistiti. Il peut même voler comme une mouche puisqu'il est suffisamment léger. C'est le parfait compagnon de jeux et d'aventures. Ils sont pour certains recouverts d'une peau poilue synthétique comme des chats. Ils enregistrent tout ce que nous faisons et nous restituent en fin de journée les scènes les plus importantes. Nous échangeons beaucoup avec eux, ils savent tout, ils sont reliés par internet au monde entier...
The Watcher: Comment un extraterrestre vivant sur une planète loin de toute préoccupation technologique peut-il comprendre que les petits animaux accrochés à la ceinture des Terriens sont des machines. Ce sont des objets qui ont évolué dans l'esprit des êtres humains pour faciliter leur communication. Ces objets se sont incarnés dans la matière que les humains ont modelé à leur image. Toute interface avec ces objets étant trop complexe pour le commun des mortels, l'évolution technique à l'identique des êtres vivants a évolué vers une totale autonomie. La démocratisation de la technologie passe par sa disparition à la vue des humains. Le jour où les petits enfants demanderont à leur nounours d'appeler leur maman par téléphone, un grand pas aura été franchi. Les choses évoluent, elles deviennent de plus en plus intelligentes pour nous servir. Vous ne pouvez déjà plus vous en passer... Un hommage a Jean-Jacques Goldman et à sa chanson sur "les choses": j'ai pris les choses et les choses m'ont prises... . "Les choses" nous prennent petit à petit... Saurons-nous comprendre qu'elles nous veulent du bien...