mercredi 30 avril 2025

La RIVIERE GRAVITATIONNELLE


Quiconque a déjà fait une paisible balade en bateau, en barque ou en canoë a probablement remarqué que lorsque le courant est faible et que l'on cesse de ramer, l'embarcation a souvent tendance à dériver vers la rive, se faisant piéger dans les herbes et les arbres qui la bordent. 


Explorons la nature de l'attraction gravitationnelle en utilisant l'analogie d'un bateau naviguant sur une rivière, représentant un objet se déplaçant dans l'espace-temps près d'un corps massif (la rive). Du point de vue de la physique mécanique, en particulier de la dynamique des fluides, nous pouvons proposer une première explication. Imaginons la rivière s'écoulant entre ses rives. En raison du frottement et de la résistance le long des rives, la vitesse d'écoulement de l'eau est considérablement réduite près des bords, approchant presque zéro juste au niveau de la rive, tandis qu'elle s'écoule le plus rapidement au centre. Cette interaction crée des turbulences près des rives, un schéma d'écoulement complexe où des tourbillons peuvent se former et, de manière significative, des parties de l'écoulement turbulent peuvent même remonter à contre-courant par rapport au flux principal de la rivière. Considérons maintenant le bateau placé sur cette rivière. Le bateau, ayant une taille finie par rapport à la largeur de la rivière (disons que sa largeur est une fraction 1/2 de la largeur de la rivière), est soumis à ces courants variables. Le gradient de vitesse à travers la rivière, combiné aux mouvements turbulents complexes incluant les flux à contre-courant près du bord, exerce une influence nette sur le bateau. Cette influence tend à attirer le bateau vers la rive la plus proche, la région où la vitesse d'écoulement vers l'aval est la plus faible et où la structure turbulente domine. Cette attraction vers la rive, expliquée par la mécanique des fluides et la turbulence, offre une image rappelant le cadre suggéré par Laurent Nottale, où des chemins non différentiables et des structures fractales gouvernent le mouvement.


Newton propose une perspective différente. Dans cette analogie, Newton ne se préoccupe pas du milieu sous-jacent – il ne « voit » pas l'eau sous le bateau. Il observe simplement le résultat : le bateau est attiré par la rive. Pour expliquer cela, il postule une force directe et invisible exercée par la rive sur le bateau, l'attirant plus près. Il fournit une description mathématique de cette force (dépendant de la masse et de la distance) mais n'offre aucun mécanisme sur la manière dont cette force est transmise, supposant qu'elle agit instantanément à travers l'espace intermédiaire. C'est une description de ce qui se passe, non du pourquoi ou du comment l'interaction se produit à travers le milieu.


Einstein, à travers la Relativité Générale, remet le milieu au centre de l'attention. Il « voit » l'eau – le tissu de l'espace-temps. Il explique l'attraction du bateau non par une force directe de la rive, mais en observant que l'écoulement de l'eau lui-même est altéré près de la rive. Plus précisément, l'eau s'écoule plus lentement près de la rive par rapport au centre. En termes relativistes, cela correspond au temps s'écoulant plus lentement près d'un objet massif. Le bateau, suivant simplement le chemin naturel qui s'offre à lui dans cet écoulement non uniforme (sa géodésique dans l'espace-temps courbe), voit sa trajectoire se courber naturellement vers la rive. L'attraction découle fondamentalement de la différence dans l'écoulement du temps (la vitesse de l'eau) entre un point et un autre, causée par la présence de la rive massive.


Nottale, avec la Relativité d'Échelle, complète sans doute cette image en fournissant une explication plus profonde du comportement complexe de l'eau qu'Einstein a décrit. Tandis qu'Einstein a identifié l'écoulement variable (dilatation du temps) comme étant la clé, Nottale explique pourquoi l'écoulement pourrait varier de cette manière. L'espace-temps fractal proposé par Nottale est analogue à la rivière turbulente. L'écoulement apparemment lisse observé à grande échelle (l'espace-temps courbe d'Einstein) est, après un examen plus attentif (résolution plus élevée), composé d'une infinité de chemins fractals complexes et non différentiables, semblables aux tourbillons turbulents et même aux contre-courants près de la rive. Le voyage du bateau ne consiste pas seulement à suivre un courant variant de manière lisse ; il s'agit de naviguer dans cette structure fractale complexe. Le ralentissement du temps près de la rive n'est pas simplement postulé en raison de la masse ; il survient parce que la distance effective que le bateau doit parcourir à travers ce milieu « plissé », fractal, est localement augmentée. La gravité observée par la RG devient une propriété émergente de la géométrie fractale sous-jacente et de la dynamique dépendante de l'échelle décrite par la RE. 

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