La non-calculabilité de la RG ne vient pas de "magie", mais de son cadre mathématique même : elle est une théorie d'équations différentielles opérant sur le continuum de l'espace-temps. C'est là que réside la première barrière. Des mathématiciens comme Marian Pour-El et Ian Richards ont montré qu'une équation physique simple peut avoir une évolution incalculable si ses conditions initiales, bien que parfaitement définies, contiennent une information non-algorithmique (comme un nombre réel incalculable). Puisque les équations d'Einstein opèrent sur le continuum, elles admettent entièrement la possibilité qu'une infime complexité non-calculable dans l'état initial de l'univers rende son évolution future, elle aussi, non-simulable.
De plus, la structure même de la RG la pousse à former des singularités — des points où la courbure devient infinie et où les lois de la physique s'effondrent. Ces "points de rupture" sont des sources potentielles de non-déterminisme. La célèbre "Conjecture de la Censure Cosmique" de Roger Penrose, qui postule que toute singularité doit être cachée derrière un horizon, est une tentative de protéger la prédictibilité (et donc la calculabilité) de l'univers. Le simple fait qu'une telle conjecture soit nécessaire prouve que la RG, en elle-même, flirte avec l'incalculable. Elle appartient au domaine de l'hyper-calcul, où les lois opèrent sur la complexité infinie des nombres réels.
C'est ici qu'intervient la Relativité d'Échelle (RE) de Laurent Nottale, non pas pour simplifier le tableau, mais pour le rendre à la fois plus cohérent et plus profondément complexe.
Dans le cadre de la Relativité d'Échelle, les singularités au sens de la RG n'existent plus. La théorie part du principe que l'espace-temps n'est jamais lisse, mais fondamentalement fractal. À l'approche de ce qui serait une singularité en RG, l'espace-temps ne se déchire pas ; au contraire, sa complexité fractale explose. Le nombre de chemins possibles diverge vers l'infini, et la distance jusqu'au centre, mesurée le long de ces chemins, devient elle aussi infinie. La singularité est remplacée par une barrière de complexité infranchissable, réalisant ainsi d'une autre manière le vœu de Penrose : elle devient physiquement inaccessible.
On pourrait croire que, en éliminant ces points pathologiques, la RE "facilite" la calculabilité. En un sens, c'est vrai : elle rend la théorie plus cohérente, sans points de rupture. Mais c'est là qu'apparaît un paradoxe magnifique. Pour résoudre le problème des singularités (un infini pathologique), la RE introduit un infini encore plus fondamental et omniprésent : l'infinie complexité structurelle de son tissu fractal.
La transition de la RG à la RE n'est donc pas un passage du non-calculable au calculable. C'est un changement dans la nature même de l'infini :
La Relativité Générale est non-calculable (Niveau 3) parce que son arène est le continuum, un infini "simple" mais fragile, sujet à des ruptures.
La Relativité d'Échelle est "encore plus" non-calculable (Niveau 4) parce qu'en plus de l'infini du continuum, chaque segment de cet espace possède une structure interne infinie.
En conclusion, la Relativité d'Échelle, en résolvant le problème des singularités de la RG, ne rend pas l'univers plus simple ou plus facile à simuler. Au contraire, elle révèle que la raison pour laquelle ces singularités n'existent pas est que la réalité est, à un niveau fondamental, infiniment plus complexe et plus riche que ce que la géométrie lisse d'Einstein pouvait imaginer. C'est une solution d'une élégance et d'une profondeur extraordinaires.
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